
Cinéma documentaire
Locaux de Peuple et Culture, 36 avenue Alsace-Lorraine à Tulle, mardi 10 juin à 18h, projection du film Le territoire des autres de Gérard Bienne, Michel Fano, François Bel et Jacqueline Lecompte ; 20h30, projection d’un film surprise.
Depuis que je tiens une caméra, le plan qui m’a rendu la plus heureuse est celui d’une fourmi qui portait un poisson sur son dos que j’ai filmé au bord du lac du Salagou. Loin des documentaires animaliers classiques, je cherche des réalisateur·rices qui tentent de s’approcher au plus près de l’animal sauvage. Qu’il soit petit ou grand, en les regardant un moment , c’est un autre monde qui se découvre. Je resterai fascinée par le fait que l’animal ne cérébralise pas sa vie. Il vit, survit sans forcément penser à comment il va vieillir. Ces deux films, que vous allez découvrir ou re découvrir, sont des approches totalement différentes de filmer l’animal sauvage. L’une est une observation à plusieurs, l’autre est solitaire, ou presque… Zoé Chantre
Le Territoire des autres est le fruit de cinq ans et demi de travail et d’observation effectués sur des animaux d’Europe chassés de leurs territoires parmi lesquels des flamands roses de Guadalquivir, des phoques islandais ou des daims et élans de Pologne… Il aura fallu deux ans supplémentaires pour faire le montage et la musique. En premier lieu, la radicalité et l’originalité du film réside en l’absence de voix off. Guidés par la seule force du son et de l’image, nous plongeons au cœur du territoire animal sans aucun mot. C’est précisément parce que les animaux n’ont pas de mots que les réalisateurs choisissent de ne pas leur en imposer. Ou plutôt, comme le note Michel Fano, parce que « les animaux ont déjà une voix à nous faire entendre. » Totalement avant-gardiste, Le Territoire des autres dénonce sans filtre les dégâts provoqués par l’homme sur la faune et la flore avec un regard sans domestication aucune.
Michel Fano se démarque totalement de la musique des films animaliers, incluant à sa « partition sonore » de musique concrète des sons non-musicaux captés sur le vif, cris d’animaux et bruits de la nature. Ne cédant à aucune tentation scientifique, le film reste, plus de trente ans après sa sortie, un véritable modèle.